⚖️ Colonnes montantes électriques : le Médiateur national de l’énergie clarifie enfin la répartition des responsabilités
- startandsoon
- 6 nov.
- 3 min de lecture
En octobre 2023, le Médiateur national de l’énergie a publié une recommandation (n° D2023-10326) apportant des précisions majeures sur la répartition des travaux entre les copropriétés et les gestionnaires de réseau (principalement Enedis) concernant les colonnes montantes électriques.
Cette clarification intervient dans un contexte où le flou persistant autour de la propriété et de la maintenance de ces infrastructures entraînait de multiples litiges, des coûts non anticipés et des risques accrus pour la sécurité des occupants.
Contexte et enjeux
Les colonnes montantes électriques (CME) constituent l’interface entre le réseau public et les installations privatives des logements.Or, la France compte encore plus de 500 000 colonnes montantes anciennes, dont une grande partie installées avant 1980.Leur vétusté, conjuguée à la complexité de leur statut juridique, en fait un point de vulnérabilité majeur dans la rénovation du parc immobilier collectif.
Insight :Avant la loi ELAN (2018), la propriété d’une colonne montante dépendait de conventions locales ou d’accords de copropriété souvent incomplets. Ce flou rendait difficile toute prise de décision technique ou budgétaire.
Cadre juridique révisé
La loi ELAN (article 176) a posé le principe que les colonnes montantes appartiennent, sauf opposition expresse, au réseau public de distribution.Cependant, son application pratique a soulevé de nouvelles ambiguïtés :
Les colonnes montantes construites avant le transfert effectif d’actifs ;
Les ouvrages mixtes ou partagés entre logements privés et parties communes ;
L’absence fréquente de traçabilité des schémas électriques d’origine.
C’est dans ce contexte que la recommandation du Médiateur d’octobre 2023 intervient, afin de clarifier les obligations respectives des copropriétés et des gestionnaires de réseau.
Les apports clés de la recommandation D2023-10326
Le Médiateur précise trois points structurants :
Thème | Avant la recommandation | Après clarification |
Responsabilité des travaux | Ambiguë entre copropriétaires et Enedis | Enedis responsable dès lors que la colonne fait partie intégrante du réseau public, y compris pour les remises en conformité. |
Critères d’appartenance | Interprétation variable selon les cas locaux | La colonne est réputée appartenir au réseau dès lors qu’elle assure une fonction de desserte commune et qu’aucune preuve contraire n’est fournie. |
Charge financière | Souvent imputée à la copropriété | Prise en charge par le gestionnaire du réseau pour les ouvrages relevant du domaine public. |
Impacts opérationnels pour les acteurs du bâtiment et de la copropriété
Les implications sont immédiates :
Pour les syndics : obligation de vérification de la propriété réelle avant tout vote de travaux.
Pour les copropriétés : possibilité de demander le transfert au réseau public des colonnes non encore reprises.
Pour les bureaux d’études et AMO : nécessité d’intégrer la cartographie précise des colonnes montantes dans les audits et plans de rénovation.
Pour Enedis : renforcement de la charge opérationnelle de maintenance et de sécurisation du parc existant.
Estimation : Le parc concerné représente environ 2 millions de logements collectifs.À un coût moyen de rénovation compris entre 10 000 € et 20 000 € par colonne, l’enjeu financier global pourrait dépasser 4 milliards d’euros sur dix ans.
Nos recommandations stratégiques
Renforcer le diagnostic des colonnes montantes - Mettre en place un audit systématique pour fiabiliser les données techniques, hiérarchiser les priorités de rénovation et anticiper les futurs travaux.
Créer un protocole type d’évaluation conjointe - Formaliser une procédure de collaboration entre copropriétés et gestionnaires de réseau (GRD) avant tout projet de rénovation globale, afin d’éviter les doublons et litiges.
Prioriser les colonnes à risque élevé - Identifier et traiter en priorité les colonnes dépourvues de dispositifs de coupure ou présentant des signes d’échauffement, notamment dans les immeubles anciens.
Assurer la traçabilité et le suivi technique - Centraliser les informations sur l’état des colonnes et les interventions réalisées dans un registre partagé (gestionnaire de réseau / gestionnaire du patrimoine).
Harmoniser les pratiques d’expertise entre territoires - Uniformiser les procédures de diagnostic, d’évaluation et de transfert des colonnes montantes afin d’assurer une cohérence nationale dans la prise de décision.
Attribuer des missions d’expertise dédiées - Confier à des structures indépendantes spécialisées le suivi technique des colonnes montantes, garantissant ainsi une expertise homogène et pérenne sur l’ensemble du territoire.
Conclusion
La recommandation d’octobre 2023 marque une étape structurante dans la gouvernance du patrimoine électrique collectif. Elle apporte une base juridique solide, mais sa mise en œuvre nécessite une coordination étroite entre gestionnaires de réseau, copropriétés et professionnels du diagnostic électrique. À terme, cette clarification pourrait devenir un levier majeur de sécurisation et de modernisation du parc immobilier français, à condition que les acteurs du secteur s’en saisissent activement.
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